Re-salut les zaeronetiens,
Puisque vous avez été quelques uns à la réclamer, voici -comme promis- la suite des aventures du "breton à Palma"

.
Nous nous étions quitté devant le MD-83 F-GRMC d'Air Lib (toujours aux couleurs d'AOM) aux pieds duquel un mini-bus d'ADP nous avait, le CdB et moi-même déposé...
Il est déjà aux environs de 14H30 lorsque nous montons quatre à quatre (remarque, je ne sais pas si il y a beaucoup plus de quatre marches

l'escalier rétractable du Mike Charly: il n'y a pas de temps à perdre si on veut décoller à l'heure prévue (15H00), surtout que l'embarquement se fait à présent "au large" (par un bus) contrairement à ce qui était initialement prévu (via une passerelle télescopique) vu que l'avion s'est "déplacé". Enfin, nous n'avons pas de slot (créneau de décollage fixé par Eurocontrol pour les vols IFR), c'est déjà ça !
Ca s'active donc sévère dans la cabine où les trois hôtesses et le stew vérifient que tout est en place, mais aussi (surtout) dans le poste où Bruno (le copi pour ceux qui n'aurait pas suivi la première partie

a déjà commencé la préparation de l'avion pour le départ pendant que le coordo en gilet fluo essaye tant bien que mal de savoir si il n'y aurait pas moyen de tracter l'avion jusqu'à la passerelle d'embarquement, mais aussi de savoir où en est le "pompiste"

qui n'est pas encore passer faire les pleins. Heureusement, le catering a fini son boulot et nos passagers auront de quoi remplir leurs estomacs

. Frank m'explique rapidement le fonctionnement du jumpseat avant de s'installer à son tour en place gauche tout en écoutant le coordo qui lui donne les infos en live puisque le commandant est le dernier "maillon" de la chaîne. C'est à lui d'orchestrer tout ça, et de prendre les décisions finales. L'APU (
Auxilary Power Unit) est déjà en marche et fournit l'électricité et l'air nécessaire à la "vie" de l'appareil au sol: conditionnement, éclairage mais surtout fonctionnement des écrans du cockpit.
Et puisqu'on parle du cockpit, je me permet d'ouvrir une petite parenthèse, même si le temps nous est compter pour partir à l'heure

. Le MD-83 n'est pas un appareil de toute dernière génération et n'est donc pas doté d'un "
full glass cockpit" avec de grands écrans multifonctions. L'équipage doit se contenter de 2 "petits" EFIS par pilotes: un PFD (
primary flight display: horizon artificiel, vitesse, etc) et un autre EFIS reproduisant un HSI classique en mode "normal" ou affichant les données de navigation sous forme d'une moving map en mode... "map"

. Pas d'EICAS non plus: les paramètres moteurs (N1, N2, EGT) sont affichés sur un grand écran central qui reproduit les "anciens" cadrans analogiques (aiguilles) en y ajoutant un affichage numérique (chiffres), les messages d'alerte (défaillance de tel ou tel système, etc) étant quant à eux affichés sur deux petits écrans placés juste au-dessus des yeux des pilotes, sur le plafonnier. Au premier abord, le cockpit parait exigu et un peu "vieillot" (malgrès ces EFIS), surtout quand on sort d'un airbus A319

. Le MD-83 semble vraiment être un avion entre deux mondes: d'un côté celui des avions "anciens", et de l'autre celui des récents. Cette impression est d'ailleurs confirmée par Frank qui m'avoue que c'est une machine demandant énormément d'attention et de contrôle, mais qui, pourvu que ce contrôle soit fait correctement, reste très saine et agréable.
Fermons la parenthèse pour ouvrir le livret rouge posé sur la casquette du poste. Il s'agit en quelque sorte du "journal de bord" (je dois avouer avoir oublié le terme exacte

où les équipages signalent les éventuelles problèmes rencontrés lors du vol précédent. Et là, on lis un <<

>>. C'est le système qui permet de chauffer l'eau utilisée par..... la machine à café de l'avion qui est hors service (
INOP) ! Imaginez un peu, la cafetière en panne, ça va pas du tout ça !

. Plus sérieusement, le message n'est pas des plus clairs, et dans le poste, on se pose des questions au sujet du passage "
côté arrière droite", mais aussi du "
Breaker TIRE !" car les 2 PNC à l'arrière appelés par l'interphone n'ont remarqué aucun breaker de tiré. La CC (Chef de Cabine) va inspecter ça à son tour: rien. Ca alors ! Le commandant décide d'y aller aussi pour en avoir le coeur net (on peut vraiment pas leur faire confiance à ces PNC

mais revient.... bredouille aussi ! On replonge notre nez dans le fameux cahier rouge, on le fait lire à tous l'équipage pour voir si tout le monde comprend bien la même chose... Mais toujours pas de breaker tiré et d'explication. Frank décide finalement d'appeler un mécanicien sur la fréquence "
opérations" d'Air Lib tout en s'inquiétant de l'arrivée du pétrole auprès du coordo qui, au passage, nous informe que là-bas, ils ont réglé leurs problèmes et sont prêts pour l'embarquement: on a un soucis dont on ne connaît pas trop l'origine et les éventuelles conséquences, des réservoirs vides, mais en même temps, l'heure tourne ! Le coordo reste confiant quant à un départ à l'heure ronde (15H00) ce qui n'est pas le cas de Frank qui essaye d'activer un peu tout ce beau monde pour minimiser le retard.
Les mécaniciens viennent d'arriver et se ruent à l'arrière tandis qu'on voit, au loin, se profiler le camion citerne, il était temps ! Frank prend la décision de lancer l'embarquement dès maintenant, même si tout n'est pas encore fin prêt, le temps que le premier bus de pax arrive, ça le fera estime-t-il. Le coordo donne donc le feu vert par talkie-walkie. L'avitaillement est en cours, les mécaniciens remontent vers l'avant de l'appareil pour délivrer leur verdict au commandant, Bruno s'extirpe de son siège pour aller faire le tour de l'avion au pas de course... L'heure tourne...
Les mécaniciens confirment qu'il n'y a pas de problème: on aura du café pendant le vol (enfin.... vous verrez ça plus tard

et il n'y a aucun autre soucis (on a toujours pas compris toute la phrase de l'équipage précédent, mais bon, c'est ça l'essentiel: RAS), l'avitailleur monte dans l'avion transmettre son document au CdB, le coordo fait de même, quelques vérifications et signatures et tout le monde sort du cockpit au moment où Bruno revient: RAS à l'extérieur également.
Il est 15H00, le premier bus de pax approche du F-GRMC. Le coordo nous salue bien bas en nous souhaitant un bon vol. C'est raté pour le départ à l'heure. Rapide coup de fil à la maison: Frank informe sa petite famille qu'il arrivera sans doute un peu plus tard que prévu. Dans le même temps, le copi se penche sur le FMS, l'ordinateur de bord, pour y sélectionner la route "
Palm1" (route n°1 vers Palma) indiquée dans notre dossier de vol (vous vous souvenez toujours de cette feuille contenant les informations générales du vol dont cette fameuse route ?) et déjà présente dans la base de données, ainsi que divers informations tel que notre masse au décollage, notre position géographique exacte (emplacement parking qui va servir de référence au FMS), le départ prévu, etc. Frank a abandonné le téléphone portable pour le micro: "
Orly prévol bonjour" ... "
Liberté 6631, la mise en route et le repoussage dans 5 minutes". Les premiers pax viennent de monter à bord, la seconde navette ne devrait pas tarder à arriver. Bruno vient tout juste de terminer les cartons "météo" (où figurent, vous l'aurez deviné, les conditions météo à Orly) après avoir consulté l'ATIS, ainsi que le carton "décollage" qui résume toutes les infos nécessaires à notre départ (piste, vitesses -V1, VR, V2-, prochain point, etc). Le CdB vérifie tout ça avant de comparer, avec le copi, les waypoints de la route entrée dans le FMS à ceux de la route figurant sur notre log. Le FMS comporte plus de waypoints, mais après vérifications, ce ne sont que des points intermédiaires qui ne modifient pas la route en elle-même. Tout est donc en bonne et due forme

.
Christine glisse sa tête dans le poste... "
120 têtes et 240 pieds, je peux remonter l'escalier ?". "
Les 120 têtes, c'est en comptant Pierre-Maxime ?" s'inquiète Frank. "
Oui, oui, on est au complet" répond la CC. "
Bon, et bien ok, remonte l'escalier et ferme"
Sur l'écran d'alerte, on voit le message "
Right door open" s'éteindre. Le message "
Cargo door open" reste présent quant à lui. On s'en inquiète par radio auprès des agents au sol qui vont nous ferme ça correctement, ça y est, plus de message. Christine réapparaît dans le cockpit, bras tendu, pousse levé, elle informe les pilotes que les PNC sont "
OK cabine !"
"_ Cales retirées" entends-t-on dans le haut parleur.
_ Frein de parc; répond Frank pour informer les mêmes agents qu'on a retiré le frein.
_ Paré au repoussage
_ Repousse"
On se sent doucement poussés vers l'arrière et on en profite pour suivre la check-list avant mise en route dans cette froide et venteuse après-midi de février. Ils doivent se les cailler là, dehors, sur leur tracteur. Belle occasion de leur lancer une p'tite plaisanterie sur la fréquence pour notre copi
"_ Huummm, j'vais enlever mon pull là, les gars, fait vraiment trop chaud en poste

))
_ Ouaip, c'est ça te fais pas de mal surtout !

"

))), Frank enchaîne par un:
"_ Paré au démarrage du 2 ?
_ Paré pour le deux; répond le sol"
Frank, qui sera PF sur cette branche, lance donc la séquence de démarrage du moteur numéro 2. Les deux pilotes suivent l'évolution de N2, puis de N1...
On prend les mêmes, et on recommence avec le numéro 1

.
Les deux réacteurs en route, le repoussage terminé, on remercie les gars au sol avant de demander le roulage sur la fréquence sol d'Orly qui nous donnera quelques temps plus tard notre clairance. Le seuil de piste approche, et Frank débute son briefing départ dans lequel il rappelle les consignes en cas de panne avant et après V1 (on commence à savoir ce que c'est sur la liste

mais je rappelle quand même qu'il s'agit de la vitesse au-delà de laquelle on ne peut plus s'arrêter et donc que le décollage n'est plus facultatif mais obligatoire, quoi qu'il arrive) mais aussi les procédures normales du jour (type de départ, montée vers telle altitude, interception de tel cap, tel radial de tel VOR, etc) puis, après que Bruno ai affirmé ne pas avoir de question, s'empare du téléphone de bord pour faire la fameuse annonce pax :
"
Mesdames et messieurs bonjour et bienvenue à bord. Je suis votre commandant. Notre décollage dans quelques minutes. Le temps sur la route est assez nuageux et on attends quelques turbulences au départ. Le temps de vol jusqu'à Palma est de.... 1H30, nous arriverons donc vers.... 16H50, et la température à destination est de 16°. Nous vous souhaitons un agréable vol en notre compagnie. [Je vous épargne ma traduction en anglais de cette annonce
]. Attention PNC à vos postes"
Peu avant de s'aligner, on reçoit de la tour notre autorisation de décoller.
La main gauche sur le manche, la droite sur les mannettes, et la roulette de nez sur la ligne, au centre de la piste

, Frank lance le MD-83, ses 119 passagers, 2 PNT, 4 PNC et 1 PM

dans la décollage. Et je peux vous dire que si il prend quelques secondes pour s'ébranler, une fois lancé, le MD-83, il poooouuuuuuuusssse bien !

. On accélère rapidement, je suis collé au dossier de mon petit jumpseat

. Bruno annonce "
V1", Frank lache les manettes pour saisir le manche à deux mains tandis que Bruno s'occupe des gaz. Quelques secondes seulement après sa première annonce, Bruno lance "
VR". Frank, tire modérément sur le manche, et l'avion quitte le sol, devenant tout d'un coup étonnement silencieux, il faut dire que les 2 réacteurs sont assez loin derrière. Vario positif, train sur rentré...
Il est 15H20; le vol IW6631 vient de prendre l'air... Direction Palma de Majorque, Baléares, Espagne !

_____________________________________________
Désolé pour ceux qui attendaient le récit du vol, mais je viens de me rendre compte que j'ai déjà mis pas mal de temps à écrire tout ça. Donc, le vol en lui-même ça sera pour le prochain coup, en espérant ne pas trop vous lasser avec tous mes messages, mais bon, je pense que ça valait le coup de raconter en détails ce qu'on ne voit généralement pas quand on prend l'avion, même si, grâce à un cockpiston ou pas, on a réussi à s'installer sur le jumpseat

.
Quant aux photos, ben ça ne sera pas pour tout de suite non plus étant donné que je ne peux pas les faire scanner maintenant, en attendant vous pouvez toujours aller sur Airliners.net:
http://www.airliners.net/open.file?id=205742 .
Et si je vous ennuis, n'hésitez pas à me le dire, parce que maintenant que je suis lancé, je suis comme le MD, je m'arrête plus

))