pros and cons du Trislander Vs Twin Otter

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Modérateur : Big Brother

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F-ALBT
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Message par F-ALBT »

En plus ça fait rêver les petits jeunes :P
"Dans la vie jette-toi à l'eau tant qu'il n'y a personne pour te pousser dans le dos." wriggles

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backflip in the air
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Message par backflip in the air »

Bon OK, je vous prépare la suite.

Vous y découvrirez que le ridicule ne tue pas, sinon, je serai mort depuis longtemps lors mon passage dans le bureau du commercial de chez Airbus. :oops:
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pizzapino
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Message par pizzapino »

Respect Backflip ! Voilà un gas qui a des c******* ! 8) Hein Jumbo ?!
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darkced
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Message par darkced »

le plus beau renversement de thread de l'histoire d'aeronet : de troll velu à récit passionant :)

en attendant la suite !
:thumb:
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backflip in the air
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Message par backflip in the air »

On dit que lorsqu’on est jeune, on est con. Si cela peut vous rassurer, la chose ne s’arrange pas forcément en vieillissant. Il y a parfois des choses qui vous passionnent ou qui vous font avancer à un point tel qu’elles vous font perdre le sens des réalités.

Trois projets possibles donc. Mes premiers actionnaires potentiels appartiennent au premier cercle de mes relations (ce qui est une erreur, vous verrez pourquoi). Aucun n’appartient au milieu aéronautique. Cela ne me dérange pas plus que ça, je pars du principe qu’une compagnie est une entreprise comme une autre, qu’il est important d’avoir des business men accomplis plutôt que des pilotes aguerris. Les premiers actionnaires potentiels sont donc un chirurgien-dentiste, un expert comptable, un spécialiste de la formation pour adulte, dont la boîte qu’il a créé marche très fort, le patron d’une agence de voyage, un agriculteur assez riche.

Quand je vous dis que l’on peut être con même à l’âge adulte !

A l’époque, le low cost est en plein développement. Les compagnies vont d’ailleurs fleurir à partir de la fin des années 90 jusqu'à aujourd'hui, il s’en créé encore plusieurs chaque année, avec des succès souvent mitigé.

Ce sera donc LE gros projet : la low cost type Easy Jet.

Nous savons donc tous ce qu’il faut faire. Après plusieurs réunion de travail où l’inspiration doit autant au talent de chacun qu’à la qualité de la bière et des merguez, on arrête le principe d’une compagnie low-cost, avec deux ou trois avions d’environ 120 à 150 places. Les avions seront loués. On débutera les opérations en mai, pour bénéficier de la reprise de l’activité aérienne. On s’installera dans le grand sud, puisque la région est très touristique. Au programme, une étude de marché (3 mois), un business plan (2 mois) et un plan de financement très détaillé avec premier engagement bancaires (2 mois). L’entreprise sera immatriculée en France, une SA avec un conseil de surveillance et un directoire, à l’allemande. On calcul ce que l’on peut mettre : 300.000 € de capital au premier tour de table. Le financement de l’activité se fera par apport en compte courant d’associés, mais aussi et surtout par emprunt bancaire, par avance de trésorerie sous forme de Dailly, et par l’entrée d’un capital-risqueur.

Les premiers contacts avec la DGAC sont assez encourageants. Alors on y va ? Z’allez pas être déçu du voyage.

Grace à l’agent de voyage, j’ai rencontré plusieurs gros voyagistes. Enfin, j’ai rencontré. J’ai surtout rencontré les acheteurs. Poliment intéressés, ils se sont pour la plupart refusés à tout engagement, et les informations qu’ils m’ont communiquées étaient maigres, partielles, et bien souvent fausse.

Une nouvelle réunion entre futurs associés nous a permis de constater qu’il nous faudrait vendre une bonne partie de nos billets par internet. Donc site internet. Donc E-business. Donc sécurisation. Donc publicité sur internet. Donc beaucoup pognon.

Mais nous avons réussi à définir un plan d’action.

Pour finir le business plan, après la stratégie Marketing (consistant en fait à faire comme les autres low-cost, sans strictement rien d’innovant), il a fallu définir les moyens et le budget. Pour cela, il a fallu définir une implantation, et rencontrer les constructeurs et les entreprises de MRO. Ne serait-ce que pour chiffrer, planifier, préparer.

Je ne suis allé qu’une seule fois à Toulouse. Pour un rendez-vous avec un commercial de chez Airbus. Je ne suis jamais retourné à Toulouse depuis.

Je tiens à préciser que j’ai quand même poussé le vice jusqu’à rencontrer un commercial de chez Embraer, de chez Boeing, et de chez Bombardier.

Réflexion faite, je n’aurai pas dû commencer par Airbus. Ils n’ont pas d’humour, et pas le sens de l’entreprenariat.

Sans rentrer dans les détails, il faut ici rappeler que les commerciaux n’aiment pas communiquer des infos techniques et financières s’il n’y a pas de perspective de vente d’appareils. Il me l’a clairement fait comprendre. J’ai bien précisé que nous n’en étions encore qu’au business plan. Il m’a dit que ce n’était pas grave, qu’Airbus avait un service qui s’occupait des startup (je ne vous raconte pas les honoraires, excédant notre budget total). Puis après m'avoir demandé quel était notre budget (voir ci-dessus) et la liste de mes actionnaires, ce dernier a gentiment pris congé, une affaire importante nécessitant sa présence. Il m’a quand même laissé son n° de téléphone (en fait, le standard d’Airbus) et son e-mail (le secrétariat d’Airbus) après m’avoir encouragé dans mon projet mais en m’encourageant aussi à revoir un peu nos ambitions. Je ne l’ai jamais revu.

J’ai été mieux reçu chez Embraer, où on a vraiment pu travailler sur les coûts de leurs appareils, sur les délais de livraison d’appareils d’occasions sortant de ligne chez des compagnies clientes. Enfin, d’UN appareil d’occasion. Mais le commercial ne s’est pas foutu de moi. Chez Boeing aussi j’ai été assez bien reçu. Là encore, on ne s’est pas foutu de moi, et le commercial m’a prodigué de bons conseils. Mais il était clair que la question budgétaire risquait de nuire à la qualité et à la réalisation du projet. En effet, contrairement à ce que l’on peut penser, il n’est pas forcément plus difficile de lever des millions plutôt que des centaines de milliers d’euros. Il y a des boîtes de conseil qui vous trouvent des investisseurs. Le problème venait du fait que la rentabilité de l’affaire serait entièrement absorbée par les frais financiers.

J’ai oublié de vous parler du commercial de Bombardier. Assez sympa, l’entretien a été assez court. Lors de mes demandes ultérieures de renseignements, son secrétariat m’a envoyé des posters de leurs avions au format jpeg. Au moins, chez Boeing, j’étais reparti avec une casquette. Je la porte assez régulièrement.

Mes actionnaires ont, à ce moment commencé à douter du projet. Il apparaissait comme peu réaliste, et en tout cas nécessitant beaucoup de travail, de capitaux, pour une rentabilité quasi nulle. Le projet s’est donc arrêté là. J’ai quand même revu plusieurs de ces ex-futurs actionnaires, dont l’un, en voyant le premier avion que nous avions acquis d’occase et avec un nombre d’heures de vols assez élevé m’a dit en souriant : « ah bah si, tu fais du low cost quand même alors ».

Suite au prochain épisode : « Vatry, c’est fini ».

Oui parce qu'entre temps, j'avais passé le VFR de nuit et commencé l'ATPL théo, la dernière nouveauté européenne de l'époque.

Je me marrais : du QCM. ça va être facile....tu parles !!!!!
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Erwan
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Message par Erwan »

Ce soir la suite??
Super intéressant!
;)
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pizzapino
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Message par pizzapino »

Ca fait vraiment rêver ! :pekin:
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Edge
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Message par Edge »

Sujet extrêmement intéressant. Il gagnerait à être transférer dans son propre topique pour plus de visibilité! A quand la suite?? :)
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bonodu06
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Message par bonodu06 »

backflip in the air a écrit :
bonodu06 a écrit :
backflip in the air a écrit : Il y a des intervenants sur ce forum qui viennent bien chercher des infos sur la meilleur façon de claquer 100.000 € dans une formation de pilote chez les belges pour aller ensuite chez Ryanair à 900 € de fixe par mois.
tu devrais te renseigner avant de balancer de la merde sur une boite que tu ne connais apparament pas du tout mon grand !!!
:D ;)
Les chiffres que j'ai sont ceux que l'on m'a donnés, ils valent ce qu'ils valent. La réponse consistait à dire que si l'on peut dépenser 100.000 € pour une formation débouchant sur pas grand'chose, on peut aussi dépenser de l'argent pour créer quelque chose.

Maintenant je peux aussi vous raconter comment la mère d'un petit jeune est venu me voir en compagnie de ce dernier, pour me demander si il y avait du boulot pour son fils dans ma boîte. Je ne reçois personne en ce moment, mais la pauvre mère de famille m'avait été recommandée par l'un des actionnaires. Je n'ai donc pas dit non.

Je la reçois en entretien avec son fils pour évoquer la situation du transport aérien (j'avais été clair au moment de la prise de rendez-vous, il était hors de question que ce soit un entretien d'embauche). A la fin je lui montre nos machine. Au pied de l'une d'elle, elle se met à pleurer, en m'expliquant qu'elle est dans une situation très difficile, qu'elle a dépensé presque 100.000 € pour la formation de son fils, qu'elle rembourse 1200 € par mois alors qu'elle est infirmière dans une clinique privée et gagne moins de 1800 € nets, qu'elle est divorcée et qu'elle a deux enfants à charge, dont le grand dadet qui lui a coûté la peau du cul et qui tire une drôle de gueule en voyant sa mère comme ça. Il n'a pas été pris chez Ryanair, alors que l'on lui avait fait une proposition de contrat (irlandais) au dire de cette personne, pour un fixe de 900 €. J'ai bien dit un fixe. J'ai pas de raison de mettre en doute la parole de cette personne.

Vous êtes bien payés chez Ryanair? content pour vous. Profitez-en, ça va pas durer. On est de plus en plus nombreux en France à se plaindre que les subventions, les fameux contrats d'assistance marketing, vont toujours aux mêmes, y compris à une compagnie irlandaise qui prend les contribuables pour des vaches à lait, alors que pour nous, il faut pleurer pour que les CCI ou CG prennent en charge les moindres travaux sur des aérodromes.

Et bien vous savez quoi, on vient de trouver plus fort que la commission européenne, que le conseil de la concurrence : les élections. Et puis on rappelle périodiquement aux élus locaux, notamment aux conseillers généraux, que ceux qui les élisent, c'est bien nous, pas le MOL. Plusieurs plate-formes françaises vont remettre en cause le système des aides. Aux dernières nouvelles, une région espagnole qui se fait bien arnaquer pourrait suivre. Résultat des courses dans quelques semaines.

J'ai rien contre Ryanair, mais mes impôts, je préfère qu'ils servent à financer l'aviation française que l'irlandaise. Et je suis pas le seul à penser comme ça. Et on est de plus en plus nombreux dans ce cas.

Bon vols à vous quand même.
Je crois qu' en discuter c'est plus ou moins comme pisser dans un violon sur ce forum , car de toute maniere , on continue à cracher sur cette boite sans meme jetter un oeil ailleurs ...
Je n'ai pas dit que l'on était bien payé , j'ai juste précisé que tu racontais de la foutaise pour ce qui est de la situation actuelle .
Donc soit tu mets tes chiffres à jours , soit tu t'abstiens et ne parle pas d'une boite et de conditions que tu ne connais pas ...

Et puis moi aussi , j'aurai préféré qu'une compagnie francaise me donne ma chance aussi , c'est actuellement quasi impossible et je ne regrette pas mon choix ...

C'est aussi simple ! cordialement 8)
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roms.77
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Message par roms.77 »

darkced a écrit :le plus beau renversement de thread de l'histoire d'aeronet : de troll velu à récit passionant :)

en attendant la suite !
:thumb:
Tout à fait! Ca mériterait un petit coup de balais de la part des modos avec un changement de titre.

J'attends impatiemment la suite également.
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marc83200
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Message par marc83200 »

Bon alors Back Flip, ça vient la suite !!! Je commence à perdre patience ;-)
Sympa ton récit , tu nous mets l'eau à la bouche: Créer une compagnie, quelle projet fabuleux.

Marc.
La fin de l'espoir est le commencement de la mort. (CDG)
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Blackberry
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Message par Blackberry »

Super, on attend la suite.
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backflip in the air
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Message par backflip in the air »

« Vatry, c’est fini…. »
Hervé Villard (enfin, je crois).


Les échecs ne sont pas tous immérités. L’échec patent du premier projet était dû à plusieurs facteurs. Une certaine impréparation. Un manque évident de connaissance du secteur, des actionnaires qui ne s’y connaissaient pas plus que moi. L’échec du projet m’a permis de ne pas faire les mêmes erreurs lorsque j’ai monté mon deuxième projet.

Du coup, pour ne pas être en reste, je n’ai donc pas fait les mêmes erreurs. J’en ai fait d’autres.

Une low cost, c’est très cher à monter. Parce que les avions tournent plus, les loyers sont plus élevés, il faut plus de maintenance, plus de personnel, plus de carburant. Il faut des moyens informatiques importants pour faire de la résa en ligne (la mise en place d’un système fiable, sécurisé, global nous aurait coûté l’équivalent de plusieurs mois de location d’une A319 à l’époque). On n’avait pas vu tout cela. Monter ex nihilo une low-cost revient plus cher qu’une compagnie régulière. Mais si on n’est pas dans le milieu aéronautique, on ne peut pas le deviner. On s’était trop focalisé sur les machines, sur le concept, pas assez sur le terre à terre : la gestion, les coûts cachés, l’organisation, le commercial.

Au début de l’année 2000, c’était internet. L’explosion de l’internet. Les startups poussaient comme des champignons, il s’en créait pour n’importe quoi. J’ai eu l’occasion d’accompagner des « web agencies » et autre boîtes du même acabit. La dégringolade en a rincé plus d’un. La confiance a été durablement ébranlée dans la net économie, mais il était clair qu’il y aurait un avant et un après. L’internet allait modifier nos habitudes de consommation.

A l’époque je n’avais pas monté de boîte, alors que c’était vraiment le moment. Ceci dit, je n’avais pas d’idée particulière. Donc pas de projet internet. En plus pour tout dire, l’informatique me faisait c…. . L’idée de la low cost est venue, et le projet lancé.

Le 11 septembre 2001 avait impacté temporairement le transport aérien. Mais ce n’était pas durable. Le business a vite repris ses droits.

J’avais raté le virage internet, je n’allais pas rater celui de la logistique.

Qui dit internet dit e-business, sites marchands, achats en ligne et livraisons express.

L’avenir, c’était le cargo. Et dans la Marne, on l’avait bien compris. Le futur de la logistique allait s’écrire à Vatry.

La plate-forme de Vatry est super. Bien équipée, longue piste, très isolée, elle permet l’accueil de gros porteur tout cargo, et bénéficie d’une zone logistique dédiée. TNT s’y était implanté, mais aussi des transporteurs Routier comme Norbert Dantressangle.

J’avais bien compris que commencer sur du gros serait très difficile sans moyens financiers importants. J’avais bien perçu la difficulté de trouver des clients en nombre suffisant pour alimenter un business aérien.

Je me suis donc dit qu’il y avait sur Vatry, une opportunité de développement d’une compagnie de deuxième rang comme l’était à l’époque Air Contractors. Gérer en sous-traitance du fret pour le compte d’un intégrateur, de transporteurs routiers, et jouer le rôle de feeder.

Il n’y avait que des avantages dans ce projet : des clients sur place, une sous-traitance qui réduit certes les marges mais permet d’avoir du volume à traiter, des avions d’occasion convertis donc moins chers à l’achat.

Les responsables de la plate-forme étaient enthousiastes. TNT était venu. DHL et Fedex allaient suivre. Ils ont vite déchanté. Moi aussi.

Les démarchages des clients potentiels a été un vrai calvaire. Passé le barrage des secrétaires, la plupart des transporteurs avaient déjà des co-contractants, ou ne souhaitaient pas s’engager. Certains regrettaient déjà d’être venus à Vatry. Le fret urgent ne décollait pas. Il était en volume très faible. L’essentiel de ce qui transitait était de la denrée périssable ou de la fleur coupée. Sans pouvoir cependant faire de l’ombre aux hollandais pour ce dernier produit.

L’idée était d’utiliser de petits avions type Brasilia ou Saab 340 A cargos. Alimenter les gros ou dispatcher le fret qui arrivait. Les avions étaient dispos, et à un tarif raisonnable. Saab notamment proposait ses premiers 340 A à des tarifs abordables à la location.

Mais en fait, le concept était pourri.

Là encore, ce n’est qu’en me rendant à CDG que j’ai compris pourquoi. C’est tout con, mais même les politiques locaux ne l’ont pas vu. Si on n’est pas du métier, on se plante.

La réponse est simple. Seules les denrées périssables passent à Vatry, parce que c’est à peu près le seul type de produit qui ne transit pas ou peu sur les plates-formes pax. Le reste des produits circule en containers, dans les soutes des avions de pax. Plus de 60 % du fret aérien passe dans les soutes des avions des compagnies régulières. A Vatry, il n’y a que du Cargo. Aucun intégrateur ne peut venir utilement à Vatry, puisque même eux, ont recours parfois aux soutes des compagnies régulières, ou récupèrent du fret à partir des grands aéroports internationaux. Vatry est à 150 bornes de CDG. Il faut camionner le fret si on veut passer de l’un à l’autre. Pour du fret express, c’est cuit, et ça augmente considérablement le Handling, et le coût de transport.

Lancer une petite boîte dans ces conditions était très risqué. Aucune visibilité, des partenaires frileux, et puis aussi, une range insuffisante pour être compétitif face à la route. Un biturboprop cargo, ça va pas loin.

Pour couronner le tout, il était manifeste que ni DHL, ni UPS, ni Fedex ne viendraient à Vatry. Il n’y avait en fait qu’AVIENT qui s’y posait, et s’y pose d’ailleurs toujours.

Et puis dernier détaille, qui a son importance : les denrées périssables voyagent en containers réfrigérés. Le braz et le saab, c’est du bulk. Donc pas de boîtes en alu.

Cet échec là m’a rincé. Je n’ai pas énormément travaillé sur ce projet, mais j’ai rarement vu autant de portes se fermer, et de personnes peu amènes. Une fois sur deux, mon interlocuteur me demandait, après que je lui ai exposé mon projet, si je tenais absolument à perdre de l’argent. « Faites autre chose » me disait-on. « Vous allez vous planter ». « C’est cuit mon bon Monsieur ».

Les compagnies 100 % cargo ont toujours eu plus de mal que les compagnies faisant du pax ou du corporate.

Ma femme commençait à en avoir marre. Elle me suggérait de rester pilote privé. Pour une fois, je me suis dit que j’allais l’écouter.

J’ai alors remballé mes projets de compagnie dans les cartons. Pour moi, l’aérien c’était fini. Définitivement. Promis juré. Marre des galères, des portes fermées, des concepts fumeux et des difficultés permanentes.

Je travaillais toujours et j’ai eu l’opportunité de m’installer définitivement en province. Une ville de taille raisonnable, déjà loin de l’agitation parisienne. Mon business, le vrai celui-là, marchait plutôt bien, et avait le bon goût de faire vivre ma famille.

Je suis donc devenu provincial. Dans une ville sympa.



Avec un aéroport à côté.



Suite au prochaine épisode : « ne pas confondre persévérance et acharnement ».
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romain83220
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Message par romain83220 »

J'admire ta démarche entrepreneuriale backfilp mais il faut avoir à l'esprit une chose :

Les marges de rentabilité dans le transport aérien sont de maximum 3% quand tout va pour le mieux : c'est le secteur LE MOINS RENTABLE.

Y a dicton qui dit: " comment un milliardaire devient millionnaire ?

en investissant dans le transport aérien "

Pour le cas des low cost et leur boulversement du TA, cela est du principalement à un mécanisme financier innovant :

La ou le modèle de rentabilité financier des grandes compagnie était de jouer sur les marges faites sur les places vendues, les low-cost sont allées à l'opposé visant a baissé leur rentabilité sur chaque billets ( billets moins cher donc ) mais en essayant de vendre à tout prix le maximum de place ce qui crée un fort effet de levier.

Bon courage

PS: n'hésite pas a écrire d'autres récits, ils sont passionnant.
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backflip in the air
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Message par backflip in the air »

Ces deux échecs relatifs m’ont appris plusieurs choses.

Il est important d’abord de voir ce que l’on veut faire, et des moyens financiers que l’on entend mettre sur la table. Il est important de savoir qui on est. Je ne suis pas fait pour diriger une grande structure. J’aime travailler en équipe resserrée. Inutile de voir grand quand on ne sait pas le faire.

Monter un projet de compagnie aérienne ou de travail aérien nécessite d’abord de connaître un minimum le secteur, mais aussi de s’entourer des personnes qui savent faire. Dès le début.

Il faut savoir avancer pas à pas, en réglant les problèmes un par un, sans rien laisser au hasard. Ne pas passer à l’étape suivante lorsque l’étape précédente n’a pas trouvé d’issue.

Il faut être franc avec ses interlocuteurs. Expliquer clairement où en est le projet, tout en lui expliquant pourquoi on vient le voir ou demander son aide. Lui expliquer ce que l’on attend de lui. Dès le début là aussi. Que ce soit lorsque l’on recherche un associé, un assureur, un DOA, un financier, ou des navigants.

Expliquer aussi que tout n’est pas résolu, et que c’est d’ailleurs pour cela que l’on vient voir la personne.

Si la personne en question ne peut pas vous aider, demandez si elle peut vous recommander auprès d’une autre, ou demandez si vous pouvez vous recommander d’elle.

Le principe est finalement simple.

« Rien ne s’improvise. Tout se prépare. »
Ferdinand FOCH (Mch de Fr).


Je me suis donc retrouvé en panne de projet, avec un PPL, et un ATPL théorique obtenu aux forceps.

L’élément clé, je le connaissais, je savais qu’il ne fallait surtout pas le sous-estimer. Je l’ai donc sous-estimé bien entendu.

Cet élément, c’est le temps. Le temps d’apprentissage, le temps de maturation, le temps de repos, le temps de récupération, le temps de loisir, le temps pour la famille, le temps pour le travail.

J’ai fini l’ATPL théo sur les genoux. J’étais déjà âgé lorsque j’ai commencé à bosser là dessus. Mais j’avais aussi un boulot, une femme, des enfants. Le travail nocturne qui m’avait permis de décrocher mes diplômes 15 ans auparavant s’est révélé assez improductif. Le surbooking, la charge de travail, la pression, le manque de sommeil, le stress, les gamins à gérer. L’enfer. Il m’a fallu presque deux ans pour tout boucler. J’étais à la limite des 18 mois entre la première et la dernière matière obtenue. Tout cela en gérant une famille, un boulot, un projet de compagnie.

Je suis donc tombé malade.

Pas très très grave, mais la fatigue emmagasinée a considérablement fragilisé mon organisme. J’avais eu la trouille en passant au CEMPN de ne pas être apte. Il fallait désormais que je me soigne, mon état de santé étant incompatible non seulement avec la classe 1 mais aussi avec la classe 2. J’ai gardé des séquelles pendant presque un an. Je n’ai pas volé pendant tout ce temps. Lorsqu’un effet secondaire était traité, un autre apparaissait.

Mais, même lorsque je n’allais pas bien, je n’ai pas arrêté de penser à mes projets. Cette période de réflexion a été salutaire. J’ai pu mettre au point tout une stratégie et un calendrier qui se révèlera in fine quasiment parfait au regard de ce qui s’est passé en suite.

De retour en forme, et après le feu vert du CEMPN, classe 1 retrouvée, j’ai commencé ma formation pro après avoir volé assez intensément. Un mûrissement sur mesure, en trimbalant mes gamins. Ou plutôt mon gamin, l’autre passant son temps à repeindre les sièges du C172. Sa mère et lui m’ont ainsi sensibilisés sur l’intérêt qu’il pouvait y avoir à ne pas entrainer l’un de mes enfants dans les airs alors que ce dernier ne partageait pas du tout ma passion.

Parce que non, la plupart de nos proches ne nous le disent pas. Non, les avions ne les passionnent pas. Ils n’ont pas envie de faire de la super nav’ et se taper trois heures de vol juste pour aller survoler la dune du Pilat. Non, l’été quand il fait très chaud, c’est pas agréable de faire de la machine à laver dans les basses couches. Non, il n’y a pas qu’info pilote dans la vie. Il y en a déjà suffisamment qui s’entassent dans les chiottes où on reste des heures. Non, la météo favorable ne vous donne pas le droit de déserter le domicile conjugal.

L’aéronautique est une passion souvent dévorante, mais en tout état de cause, incroyablement égoïste. Elle nous pousse à dépenser notre énergie, notre temps, notre santé, et énormément d’argent pour notre seul plaisir. Alors que nous ne sommes pas seuls. Les vols ne se partagent pas beaucoup. La famille et les amis en ont rapidement marre d’aller avec vous. Le pilotage professionnel est encore plus égoïste. Il n’y a que des pros dans le cockpit.

Raison pour laquelle j'ai pris le partie d'étaler ma formation, de prendre le temps de développer le projet.

Après tout, j'étais encore vivant et sans doute pour plusieurs années. Rien ne pressait.

J’ai étalé ma formation CPL et IR sur plusieurs mois. Le choix de l’école a été vite fait, la plus proche de mon domicile. Elle m’offrait une grande souplesse dans la planification des vols, j’ai trouvé des instructeurs très pros, et qui ont eu avec moi un élève très consciencieux, mais certainement pas le meilleur qu’ils aient eu, loin s’en faut. Je volais deux à trois demi-journées par semaine. Pas plus. Résultat, huit mois et demi pour l’IFR.

Je ne suis pas un pilote remarquable. Je ne suis pas un clampin non plus. Je suis un pilote moyen, sérieux, méfiant et un peu parano. J’ai pris le temps de me former, d’acquérir vraiment le savoir faire demandé.

Je me suis donc retrouvé avec un CPL/IR tout beau, avec la forte impression de m’être offert une danseuse.

Lors d’un vol perso, j’ai rencontré le patron d’une boîte de maintenance. Il était dehors et discutait avec ses gars. Nous engageons la conversation, et rapidement, je m’aperçois que nous avons un ami commun. Je l’avais rencontré il y a en fait plusieurs années, pour le rachat d’une entreprise de maintenance industrielle.

Aujourd’hui, il fait toujours parti de mes actionnaires.

La suite dans le prochain épisode : « Mon mari ? son nouveau boulot ? …. »
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omerta
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Message par omerta »

backflip in the air a écrit : Parce que non, la plupart de nos proches ne nous le disent pas. Non, les avions ne les passionnent pas. Ils n’ont pas envie de faire de la super nav’ et se taper trois heures de vol juste pour aller survoler la dune du Pilat.

L’aéronautique est une passion souvent dévorante, mais en tout état de cause, incroyablement égoïste. Elle nous pousse à dépenser notre énergie, notre temps, notre santé, et énormément d’argent pour notre seul plaisir. Alors que nous ne sommes pas seuls. Les vols ne se partagent pas beaucoup.
Tellement vrai malheureusement .......

........Envois nous la suite, je suis sûr que c'est toi MOL !!! Sors de ce corps !
Si jeunesse savait, si vieillesse pouvait ..........
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mosquito
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Message par mosquito »

backflip in the air a écrit :Il y a des intervenants sur ce forum qui viennent bien chercher des infos sur la meilleur façon de claquer 100.000 € dans une formation de pilote chez les belges pour aller ensuite chez Ryanair à 900 € de fixe par mois.
???
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romain83220
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Message par romain83220 »

La suite !!
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Stiletto150
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Message par Stiletto150 »

oui la suite Backflip stp :-)
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Fbs
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Message par Fbs »

la suite, la suite....
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