Qu'est-ce qui fait la sécurité aérienne ?

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PilotJulien
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Enregistré le : 16 févr. 2021, 15:10

Qu'est-ce qui fait la sécurité aérienne ?

Message par PilotJulien »

Voici un vaste sujet que j'ai voulu lancer depuis quelques temps.

Avec de nombreuses questions sans réponses :
Qu'est-ce qui fait la sécurité aérienne d'une exploitation ? La question se subdivise en beaucoup d'autres.
Comment la mesurer ?
Comment expliquer un tel écart entre les opinions qu'on peut se faire sur quelques facteurs et la réalité ?
Qu'est-ce qu'un bon pilote ?
Comment former un bon pilote au sens de la sécurité aérienne ?

Quelques remarques sur chacune :
Ma compagnie semble se limiter à la mesure de quelques critères (en tout cas ils ne communiquent pas sur beaucoup de critères différents) et sans expliquer leur intérêt fondamental. Par exemple, le pourcentage d'approches non stabilisées non suivies de remises de gaz. Mais sans préciser quels sont les incidents mesurés suite à ces fameuses approches poursuivies.
Quoi qu'il en soit, la SV me semble un problème trop complexe pour être résumé à quelques mesures de chiffres. On cherche à éviter des événements qui, heureusement, sont déjà extrêmement rares. Comment donc savoir si la SV est si terrible que ça, avec certitude, avant d'avoir eu deux crashs ? Dans le cas du Boeing 737 max, un seul avion crashé au bout de quelques mois, cela pouvait statistiquement être la faute à pas de chance. Ce n'est qu'avec le deuxième qu'une certaine certitude se dégage.
On cherche des signaux précurseurs, mais lesquels ? Les incidents et non respects de procédures n'ont pas forcément de liens avec les crashs (ce sont avant tout les décès qu'on cherche à éviter absolument, les dégâts matériels dans une moindre mesure). Par exemple, on peut imaginer une population de pilotes compétents faisant preuve de bon sens qui n'hésite pas à enfreindre la règle de stabilisation d'approche, qu'ils jugent bureaucratique, mais ne crashent pas l'avion, et à l'inverse une population dans une compagnie où les équipages sont fliqués, et sous entrainés, fatigués, qui du coup n'hésitents à remettre les gazs mais crashent parfois l'avion.

On arrive naturellement à la deuxième question. Je viens de dire qu'on s'attendrait à ce qu'une compagnie qui traite mal ses pilotes ait de mauvaises statistiques. Par exemple, fatigue, et forts rythmes de travail, budgets de formation faibles, mauvais salaires, mauvaises conditions, mauvais entrainement au pilotage manuel, mauvais état mécanique des avions, mauvaise formation et sélection des pilotes...
Pourtant, sans vouloir citer de noms que chacun imaginera facilement, il existe des tas de compagnies dont on s'attendrait à ce qu'elles plantent un avion par semaine vu les cadences et les maltraitances imposées à leur personnel, qui en réalité ne crashent quasiment pas d'avions, et les mauvaises langues ne peuvent pas critiquer les mauvaises statistiques, mais seulement dire qu'ils ne seront pas surpris face au prochain crash, qu'ils attendent pour bientôt.
Celui ci n'arrive pas (même s'il arrivait ce ne serait pas forcément une preuve solide..) ou pas plus que dans les compagnies mieux disantes.
On peut appliquer le même type de raisonnement pour les éléments que j'ai cités, pas forcément dans la même mesure pour chaque, mais on s'apercoit que parfois des compagnies bien disantes sur tous ces points ne font pas mieux que des compagnies difficiles avec leurs personnels..

Ce qui nous amène aux pilotes. On pourrait dire : les pilotes experimentés et leur compétence sauvent les boites mal disantes. Mais qu'est-ce qu'un bon pilote ? Ryanair prend des jeunes sortis d'école, les met à gauche plus rapidement que leur ombre, leur interdit de déconnecter trop d'automatismesa (corrigez moi si je me trompe, je ne suis pas là pour médire sur telle ou telle compagnie), les fait s'endetter et déménager, mais n'ont jamais crashé un avion !? Un bon pilote, du point de vue SV, est quelqu'un qui ne plantera pas l'avion. Mais même question, comment peut-on mesurer des signes précurseurs de cet événement ? Un pilote expérimenté qui accepte un posé long de 100 ou 200 mètres sans remise de gaz, parce qu'il a la COS de la longueur de piste et des perfos de son avion, doit-il etre vu comme plus dangereux que celui qui remet les gaz et se met dans une situation plus proche de la réserve finale sans raison si valable que ca ? (Le premier a dégagé à la première bretelle en autobrk low malgré le posé long)

C'est là qu'on en vient aux politiques des compagnies, sur les opérations et sur l'entrainement. Je ne suis pas là pour débattre du bien fondé de régles sur les posés longs et les ANS.. Il faut viser des touchers précis, des approches stabilisées, même si on ne compte pas être casque à pointe derrière.
Néanmoins sur l'entrainement, comme déjà évoqué dans un précédent topic, je suis toujours autant étonné de ce qui nous est réservé.
On passe la majorité de notre temps sur des compétences non techniques, qui sont très importantes mais ne sont pas celles qui font voler l'avion. Deux pilotes incompétents (sujet à débat mais par exemple : ont besoin du résumé de la séance simulateur à l'avance pour savoir de quel pied botter pour contrer la panne moteur) mais en parfaite entente et communication, face à un grave souci mécanique, vous rassureraient-ils ?
Sur l'UPRT, diverses manoeuvres d'urgence, les pannes, j'ai l'impression que la formation s'étant orientée de plus en plus vers le non technique, les scénariis se simplifient.
Pour moi, pour toutes ces choses, la formation devrait se dérouler en deux temps :
Formation pour apprendre les bons gestes, les répéter et les mécaniser un peu. Ce qui est fait.
Vérifier cette mécanisation pour de vrai avec des surprises, ca n'est quasiment jamais fait.
A mon avis, au simulateur devraient occasionnellement surgir des rafales de vent retournant l'avion, des montagnes juste devant la trajectoire, des pannes moteur à des endroits improbables... en précisant par la suite que la raison de cet événement n'est pas réaliste mais a pour but de mettre l'équipage dans la même situation de surprise que celle dans laquelle se retrouvent ceux à qui c'est arrivé en vrai : s'ils sont dans cette situation c'est bien parce qu'ils ne l'ont pas vue venir (ou ne pouvaient pas la voir venir, cas de la panne moteur). Au lieu de ca, on prévient.
Prévenir c'est bien pour la première phase d'apprentissage, mais ca ne permet pas de vérifier la bonne mécanisation de la réaction une fois sous stress..
Je lis sur pprune que les séances simu circulent dans de nombreuses compagnies. Ne ferait-on pas mieux de vérifier une réponse acceptable (safe outcome) face à n'importe quel événement réellement inconnu et imprévu, plutôt qu'attendre une réponse parfaitement dans la ligne du livre face à des secrets de polichinelle ? C'est bien le fait d'attendre une réponse parfaite qui pousse à aller chercher les informations en avance...

Voilà, mon topic commence à être assez long comme ça, je pense qu'il y a matière à lancer la discussion.
Merci de m'avoir lu
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