Le bi moteur de Trimaille se crash à Villejuif (94)

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LC41
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Re: Le bi moteur de Trimaille se crash à Villejuif (94)

Message par LC41 »

LC41 a écrit : 19 déc. 2023, 19:27
IbraBell a écrit : 19 déc. 2023, 15:14 Les moteurs étaient RH 1900h (tbo) et LH 400h (neuf) avant l'accident: lors d'un vol d'instruction avec le proprio, ils ont coupé le moteur gauche mais le moteur droit était trop fatigué (apparemment des problèmes d'injection selon BEA)
Moteur fatigué? Je me serais attendu à de la casse, pas à un problème d'injecteur qui peut arriver à n'importe quel avion, à n'importe quel âge... Ce genre de raccourcis est assez facile. Donc c'était bien une blague ;D

Sur un pb de ce genre, il y a dû avoir des symptômes; vibrations, manque de puissance (asymétrie)...
En lisant le rapport à tête reposée, je note que la défaillance d'un moteur, ou sa vétusté, n'est pas due à son âge, et donc pas à sa "fatigue" présumée, puisque un moteur "neuf" de 400 h a lâché après que le moteur vieux de 1900 h. Dans le cas des deux moteurs il y a eu des problèmes d'entretien manifestes dont ni le propriétaire au moment de l'accident, ni le précédent propriétaire ne s'étaient rendus compte, ou ne s'étaient préoccupés.

Je note aussi que l'on remet en cause le régime d'entretien FAA, alors qu'au final le régime d'entretien en Part-ML s'en rapproche quand même beaucoup. Les mécanos qui font de l'entretien FAA ont le plus souvent aussi des papiers AESA, donc ont les mêmes compétences. Lorsqu'un mécano doit démonter quelque chose pour l'inspecter et en suite le remonter, il y a toujours le potentiel qu'il introduise un problème qui n'existait pas avant. Très souvent ils ne suivent pas le manuel d'entretien du moteur dans la réalisation des tâches, ni les "Standard Practices", par facilité, paresse ou ignorance. Voici des problèmes concrets que j'ai noté dans mes expériences avec les ateliers/mécanos:
  • Ils réutilisent les anciens boulons de cylindre lors du remplacement des cylindres alors que le manuel dit expressément qu'il faut de la visserie neuve.
  • Ils ne maintiennent pas les deux demi-coques sous pression lors du démontage de cylindres, alors que le manuel dit qu'il faut.
  • Ils ne lubrifient pas des boulons qui devraient l'être ou vice-versa, ce qui fausse le serrage (dry vs wet torque).
  • Ils n'appliquent pas de frein-filet alors que le manuel dit qu'il en faut
  • Ils oublient de resserrer correctement les magnétos suite au calage, provoquant en plus une fuite d'huile
  • Il crée une fuite d'huile et me dit de voler avec et voir si ça persiste
  • Ils refusent souvent d'utiliser une clé dynamométrique là où ils devraient, d'après le manuel.
  • Ils ne remplacent pas les joints (d'injecteurs, d'échappement, d'admission...) parce qu'ils n'en ont pas sous la main
Mais ces mêmes mécanos avaient aussi un œil aiguisé qui leur ont permis d'identifier et corriger des problèmes que je n'avais pas vus.

L'erreur est humaine, et les mécanos ne sont pas surhumains, même si le penser nous rassure. Beaucoup de ces manquements sont généralement sans conséquence, mais de temps à autre il y a un cylindre qui est arraché du bloc moteur parce que la visserie cède, parce que le serrage était incorrect, un moteur qui serre parce que les paliers ont tourné, un cylindre qui craque au niveau de l'injecteur...

Mais de là à introduire des pièces métalliques dans un injecteur pour le nettoyer... ce qui n'est bien entendu pas la méthode préconisée par le manuel d'entretien, n'est vraiment pas malin. L'âme brillante qui a fait ça l'aurait fait sur un moteur de n'importe quel âge, et de mémoire les injecteurs se nettoient toutes les 500 h, ou éventuellement lorsqu'ils se retrouvent bouchés entre deux inspections des 500 h, ce qui peut arriver en cas de contamination du système de carburant. Cela est autant d'occasions pour un mécano d'y introduire un objet métallique pour le "déboucher" et abîmer l'injecteur, autant d'occasions d'introduire une saleté dans l'injecteur, autant d'occasions de ne pas remplacer un joint qui aurait dû l'être, de trop serrer (sans clé dynamométrique) l'injecteur et criquer la culasse.

Trop est donc l'ennemi du bien. Toute tâche d'entretien est une occasion de créer un problème, et plus on fait de tâches d'entretien, et plus souvent on les fait, plus la probabilité est grande que l'on introduise au moins un problème. Il faut donc vraiment évaluer le risque/bénéfice de chaque tâche d'entretien avant de la mettre dans son programme d'entretien. Par exemple, nettoyer les injecteurs ne va pas empêcher qu'il soient bloqués par une impureté qui se retrouverait dans l'essence; au contraire, toute intervention sur le circuit d'essence après le filtre est une occasion d'introduire des impuretés dans les injecteurs, le remontage d'un injecteur est une occasion de criquer la culasse, et c'est apparemment une occasion qu'un mécano essaie d'y introduire du fil à freiner pour le débloquer. Le bénéfice de nettoyer les injecteurs toutes les 500 h est donc quasiment nul, mais le risque n'est pas négligeable.

Dans le cas de cet accident, les problèmes du moteur gauche n'ont pas pu échapper à l'atelier qui doit faire un point fixe après la 100 h/annuelle, ni au propriétaire. Il semble qu'il y ait eu beaucoup de négligence.

Le problème est aussi que les ateliers vivent des tâches d'entretien. Plus ils en font, plus ils gagnent, sauf si le coût d'entretien est si élevé que le propriétaire finit par abandonner son avion faute de moyens pour l'entretenir. Ils veulent en faire le maximum, d'où leur hostilité envers Part-ML et les programmes déclarés "minimalistes"...
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